Ouvrage sur les vampires 1751

Il s'agit du livre de Dom Augustin Calmet (abbé bénédictin) intitulé « Dissertation sur les revenants en corps, les excommuniés, les oupires ou vampires, brucolaques, etc. », ouvrage qui était en fait le second tome d'un traité plus grand incluant aussi les apparitions. La version remaniée de 1751 a été rééditée en 1988, puis en 1998 (en français) par Jérôme Millon.

Le Dictionnaire de Trévoux (1771), tome VIII disait - citant en cela l'oeuvre de Dom Calmet : «  Vampire, Wampire, Oupire et Upire, n. et f. Les Vampires sont une sorte de revenants qu'on dit infester la Hongrie, la Moravie, la Bohême, etc. Ce sont des gens qui sont morts depuis longtemps et qui reparaissent, se font voir, marchent, parlent, sucent le sang des vivants, en sorte que ceux-ci s'exténuent à vue d'oeil, au lieu que les cadavres, comme des sangsues, se remplissent de sang en telle abondance qu'on le voit sortir par les conduits et même par les pores. Pour se délivrer des Vampires, on les exhume, on leur coupe la tête, on leur perce le cour, on les empale, on les brûle.  »

On se rend compte en lisant le livre de Calmet que le mythe du vampire actuel remonte en fait (au moins) au XVIIIème siècle. Des histoires existaient auparavant sur des morts qui sortent de leur tombe et qui causaient du tort à leur entourage, mais les caractéristiques des vampires - ainsi que leur nom - viennent d'histoires relatées pendant la première moitié du XVIIIème et spécialement dans les régions centrales de l'Europe citées ci-dessus (une véritable épidémie à l'époque).

J'ai noté dans ce que j'ai lu :

- Calmet dit que « vampire » ou « upire » vient de « sangsue » ce qui est faux : on sait que ce mot dérive du turc « sorcière ». En effet, les premières histoires de « suceur de sang » étaient attribuées à des sorcier(e)s. Comme l'empire ottoman englobait la Serbie où des légendes couraient, ce mot a dû passer en Autriche-Hongrie.

- les grecs de l'époque appelaient les vampires des « vroucolacas » (transcrit en « brucolaques » par Calmet). On raconte une histoire des années 1730 rapportée par des voyageurs français de l'île de Mykonos où toute la population était devenue quasi folle car une de ces créatures les terrorisait (jusqu'à ce qu'on brûle son cadavre).

- les vampires reviennent pour « s'occuper » avant tout de leur famille, dont ils déciment tous les membres un par un en leur suçant le sang (et souvent ils s'arrêtent là). Les victimes dépérissent puis meurent. Dans des histoires moins nombreuses, les vampires s'en prennent au village, y compris les animaux.

- les personnes ainsi mordues par des vampires peuvent le devenir à leur tour une fois mortes, mais pas toujours. Il y a même une histoire où les gens sont devenus vampires parce qu'ils avaient mangé les animaux mordus par un vampire. On précise que la morsure ne se pratique pas à un endroit particulier du corps.

- la plupart du temps, les gens savent qui est le vampire mais dans le cas contraire, on a réussi à le coincer en faisant se promener dans le cimetière un cheval monté d'un garçon vierge nu (ben voyons). Le cheval refuse de passer au dessus de la tombe du vampire.

- contrairement au mythe actuel, il n'y a aucune histoire dans laquelle le vampire craint la lumière du jour. Il revient de préférence la nuit (pour ne pas être trop vu) mais dans plusieurs cas aussi le jour (une fois de midi à minuit). Donc pas de vampire qui flambe au soleil (trop facile !). De même Calmet ne parle pas des gousses d'ail mais dans l'introduction au bouquin, Roland Villeneuve indique que ce « remède » était connu d'autres ouvrages.

- le vampire quand il revient dans sa famille peut s'asseoir avec eux à table et manger la même chose.

- pour faire cesser le manège du vampire, le rituel est toujours le même, en plusieurs étapes croissantes (si une seule ne suffit pas). Les plus courantes sont de couper la tête du corps (qu'on trouve toujours dans sa tombe) ou de lui enfoncer un pieu dans le coeur (le pieu doit être en buis ou laurier béni). Si après ça le vampire réapparaît, on réouvre la tombe et on brûle le corps (il n'y a pas de cas où il soit réapparu après ça).

- le corps du vampire est toujours bien conservé même des années après (mais on ne sait pas comment il sort de son tombeau). Parfois il est gonflé (soi-disant du sang de ses victimes), au point qu'il en sort par les pores, les oreilles etc. Parfois le vampire baigne carrément dans une mare de sang.

- ce qui est intéressant, c'est qu'on a des comptes-rendus d'enquêteurs (militaires, ecclésiastiques etc.) ce qui fait qu'on a même le nom des vampires en question (au moins dans trois cas bien documentés).

Si ce bouquin vous intéresse :

http://www.millon.com/collections/religion/atopia/revenants.html